Un regard sur les maladies neurodégénératives

 

  par Régine LODOMEZ et Virginie COUTELLIER

Logopèdes

 

 « A 44 ans, je suis devenue la mère de ma mère.  Il y a à peu près deux ans, nous avons noté des changements chez maman.  Evidemment, ça s’est fait progressivement.  Elle cherchait les disputes, nous poussait à bout et elle riait méchamment lorsqu’elle avait atteint son but.  Cette dernière année nous a laissés épuisés, vidés, sans énergie.  Et puis des tests ont confirmé nos soupçons : maman avait bien la maladie d’Alzheimer. » Anne

 

L’espérance de vie augmentant, nous entendons de plus en plus souvent parler de maladies et notamment de maladies neurodégénératives. Ces maladies effraient  par méconnaissance et  par le regard que notre société porte sur les personnes très âgées ou très dépendantes.

 

Tâchons d’en savoir plus….

Les maladies neurodégénératives sont des affections qui touchent le cerveau et le système nerveux et qui évoluent progressivement.  Elles lèsent petit à petit les  fonctions nerveuses et l’activité des neurones.  Elles peuvent toucher les fonctions motrices, pouvant provoquer par exemple une paralysie, une dysarthrie (trouble de la parole), une dysphagie (trouble de la déglutition), etc.  Elles peuvent également toucher les fonctions cognitives comme la mémoire, le langage oral et/ou écrit, la capacité à être attentif, la capacité à s’adapter à de nouvelles situations, etc.

 

Le retentissement sur l’autonomie de la personne atteinte est inévitable.

 

Les lésions peuvent toucher différentes zones du système nerveux.  La localisation de l’atteinte définira le type de maladie neurodégénérative. 

 

Parmi les plus connues, on retrouve la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la sclérose en plaque, la sclérose latérale amyotrophique (maladie de Charcot), la maladie de Creutzfelt Jacob, le syndrome de Korsakoff.

 

« Les gens ne voient pas, ne savent pas, ils ne peuvent même pas imaginer ce que je vis.  Ma mémoire s’évapore comme des effluves d’alcool.  J’ai perdu la notion du temps.  Je peux rester des heures dans un magasin sans m’en rendre compte.  J’ai beaucoup de mal à me concentrer aussi.  Je suis incapable de planifier une journée car le moment venu, j’oublierai plus de la moitié des choses à faire.  Même celles marquées en évidence sur une feuille, sous mon nez», Richard

 

Des symptômes identiques peuvent se retrouver parmi ces différentes maladies, ce qui rend parfois le diagnostic différentiel peu aisé.

 

Elles sont malheureusement toutes évolutives et le pronostic d’évolution varie en fonction du type de maladie.  Pour certaines, les avancées médicales permettent de mettre en place des traitements susceptibles d’en ralentir l’évolution.

 

Outre le corps médical, différents professionnels (neuropsychologues, logopèdes, ergothérapeutes, kinés, etc.) sont également mobilisés le plus précocement possible dans le but de maintenir au maximum les fonctions préservées dans un cadre écologique.   Ces professionnels ont également un rôle d’information, d’écoute, et d’accompagnement.

 

« C’est vrai les malades ont besoin d’aide mais croyez-moi, leur famille aussi. », Anne

 

Pour changer notre regard…

(Van Gorp et Vercruysse, Framing et reframing : communiquer autrement sur la maladie d’Alzheimer, Fondation Roi Baudouin, 2011)

 

Alors, plutôt que de ne voir chez les malades que les restes d’une enveloppe matérielle perdant son esprit… gardons à l’esprit que les malades restent des êtres humains avec leur identité, leur personnalité, leur passé.

 

Alors, plutôt que de considérer la maladie comme un ennemi ou un monstre qui doit être combattu… envisageons-la comme un compagnon de voyage  que l’on rencontre sur le chemin de son existence et avec qui il faut accepter de vivre.

 

Alors, plutôt que d’assimiler le diagnostic à une sorte de condamnation à mort au début d’une catastrophe totale… mettons l’accent sur le temps que les personnes ont encore à vivre en savourant chaque instant.

 

Plutôt que de porter le fardeau qu’est la maladie… conservons des contacts émotionnels en continuant à considérer le malade comme une personne à part entière.

 

 « Mon papa est Alzheimer depuis maintenant 3 ans.  Tout a été très vite, aujourd’hui, il ne parle plus.  Le plus dur a été de voir s’écrouler cette image que j’avais de lui.  De voir disparaître toutes ces choses qui étaient en lui.  Puis la colère, la déception, la révolte ont laissé place à une nouvelle façon d’être.  Tout doucement, il m’a appris à être à l’écoute, à ne pas lui imposer de continuer à être ce que moi je voulais toujours qu’il soit mais à être à l’écoute de ce qu’il devenait.  Petit à petit, chaque nouveau signe de sa maladie m’amena à l’écouter au-delà de sa lente déchéance.  A un niveau toujours plus subtil en lui et en moi.  Comme si cet événement était une invitation à un voyage intérieur.  La destruction de tout ce qui avait construit notre relation, au lieu de l’anéantir, a fait renaître l’essentiel, l’origine et le but : l’amour.  Ce grand silence qui s’installe chaque jour un peu plus est rempli de cet amour qui ne demande qu’à être écouté.  Comme si, au-delà du rôle que nous jouons, au-delà de la réussite sociale, au-delà de la possession, bref de tout ce sur quoi nous construisons généralement notre vie, il y avait quelque chose de plus grand, de plus simple, de plus réel : cet amour inconditionnel.  Finalement, ce n’est pas la maladie qui est insupportable, ni la vie qui est injuste, le plus dur, c’est ce combat contre nous-mêmes, contre nos peurs et nos préjugés.  Ce chemin très douloureux mais qui nous conduit à être à l’écoute de ce qu’il y a de plus élevé en nous. » Francis

 

Témoignages tirés des vidéos « Des mots pour Alzheimer » éditées par l’Association France Alzheimer (disponibles sur YouTube)