loi réglementant les psychothérapies…pour respecter le patient : oui !  mais pas à n’importe quel prix !!! 

 

Marie-Paul  Demoustier

Psychothérapeute-Psychanalyste

 

 

Dans la droite ligne de la newsletter de janvier, je vous propose de poursuivre la réflexion quant à la complexité de la personne humaine et l’abord  de notre travail dans cette optique.

 

Il est de notre ressort, à nous praticiens de savoir écouter cette complexité, au-delà du trouble qui envahit le patient : la nomination du trouble ( addiction, décrochage scolaire,  dys phasie, hyperactivité, difficultés d’intégration..etc ) doit rester UN éclairage sur la problématique que traverse le patient. En aucun cas, cette nomination diagnostique ne doit devenir déterminisme au vu d’un protocole figé et figeant, un protocole « bon » pour tout le monde.

 

 Il s’agit, avant tout, d’une rencontre avec une personne en souffrance qui s’adresse à nous, qu’elle soit toute jeune, adolescente, adulte. Une personne avec son corps, son cerveau, son psychisme : son histoire personnelle, sa manière de vivre les événements, de concevoir la vie.

 

Il s’agit d’une rencontre avec un « être humain » qui, depuis le début de sa vie, a changé, change et changera .

 

Alain Prochiantz, scientifique neurobiologiste, nous l’indique dans sa conception du Vivant (1) :  L’Etre humain est en perpétuel changement au long de sa vie tout en gardant ses données génétiques. Il est en métamorphose permanente.

 

« Y a de l’histoire( ce qu’on vit tous les jours, ce qu’on subit ou qu’on fait subir) qui s’inscrit dans une matière vivante (données génétiques) . Sous le Visible, il reste l’Invisible, il reste l’Insu ( ce qu’on ne sait pas encore, ce qu’on ne comprend toujours pas » (2).

 

Nous sommes et travaillons donc avec des Etres Vivants. Il me semble essentiel de garder une ouverture à l’étonnement, une ouverture à ce qui arrive  « sans crier gare » : découvrir et inventer à partir de ce que le patient nous apprend, nous sommes à ses côtés pour l’aider  à construire SES solutions.

 

Il ne suffit pas de suivre un protocole de soins « bon pour tous » mais de moduler, prendre le temps, observer, se questionner, écouter et hésiter…même.

 

La vague évaluatrice actuelle tend à une « normalisation » de chaque Homme, à l’enfermer dans des cases réglementées par des comportements… Qu’est-ce que la normalité et la santé mentale ?

 

La planification des pratiques psychothérapeutiques à travers des protocoles de soins et diagnostics figés  nie  les particularités de chacun et ses  possibilités de changements.

 

La stricte planification, pour les praticiens, de cursus de savoirs (à ingurgiter) (3) sans en passer par la propre écoute de soi-même nie l’existence de la relation (dite transférentielle) indispensable qui permet le changement et la traversée de la souffrance et nie  la qualité d’écoute attentive et éclairée qu’un tel travail nécessite.

 

(1)(1)  Livre d’A. Prochiantz, « Qu’est-ce que le Vivant » Ed.Seuil.

 (2(2)Extrait de la conférence donnée par A. Prochiantz lors du congrès de Psychanalyse –Journées ECF Paris ( 5-6/11/2016) « l’Objet regard ».

 (3(3) La loi concernant les psychothérapies, rédigée par Mme M de Block, a été votée en juin 2016.  Des recours à cette loi (établie sans concertation avec les gens du terrain) ont été introduits par les praticiens  qui s’opposent à son contenu dont un certain nombre d’entre eux  se verraient interdits de pratique après x années de travail tout à fait satisfaisant … !